Feedback AAD 2018

RÉSUMÉS

Dermocosmétologie

Cosméceutiques: Naturellement absurdes

Présenté par: Zoe Diana Draelos, MD, FAAD
Dermatology Consulting Services, High Point, NC, USA

L’eau micellaire gagne en popularité dans le marché des cosméceutiques depuis quelque temps. Elle se compose de micelles, qui sont de petites billes de molécules d’huile nettoyante en suspension dans de l’eau douce. La micelle a un centre hydrophobe et une enveloppe externe hydrophile qui lui permet de se dissoudre dans l’eau. L’eau micellaire est un surfactant qui forme des micelles en solution. Le centre des micelles permet de dissoudre le sébum facial, tandis que l’enveloppe externe se rince à l’eau. L’eau micellaire est très utile chez les patients qui ont une peau sensible, y compris ceux qui souffrent de dermatite des paupières, de dermatite atopique et chez les personnes d’âge mûr qui ont une peau sèche.

À l’heure actuelle, des hydratants peptidiques sont commercialisés comme cosmétiques. Ils reposent sur trois types de peptides, les peptides vecteurs, les peptides signaux et les peptides neurotransmetteurs. Les peptides vecteurs transportent un ingrédient actif vers la peau, mais ne constituent pas le principe actif de l’hydratant. Les peptides signaux transmettent un signal à la peau qui déclenche un phénomène biologique. Les peptides neurotransmetteurs modulent l’interaction nerf/muscle comme mode d’hydratation. Les peptides vecteurs fixent un principe actif à une de leurs extrémités et en facilitent le transport vers la peau. Pour la cicatrisation des plaies, les peptides vecteurs servent à acheminer vers la lésion le cuivre nécessaire à la cicatrisation et à la production de collagène. Toutefois, dans un hydratant, on craint une possible contamination par les métaux, particulièrement par le nickel. La contamination par les métaux déstabilise la préparation. Et la présence de la couche cornée empêche souvent ces préparations de franchir la barrière de la peau et donc d’exercer leur pouvoir hydratant.

Les peptides signaux sont conçus pour déclencher une cascade de phénomènes dans la peau. Le plus populaire est le palmitoyl-pentapeptide-IV (ou pal-KTTKS, pour palmitoyl pentapeptide palmitoyl-lysine-thronine-threonine-lysine-serine), une substance synthétique qui a été conçue comme agent topique pour stimuler la production de collagène (I, III et IV) et produire ainsi des effets antirides. Le palmitoyl agit sur la couche cornée pour permettre aux autres molécules (KTTKS) de pénétrer la peau. La quantité de peptides signaux qui entrent dans la fabrication des hydratants est extrêmement faible, soit 4 parties par million, par conséquent, les publicités à leur sujet sont mensongères.

Les hydratants à peptides neurotransmetteurs inhibent la libération de l’acétylcholine à la jonction neuromusculaire (JNM), ce qui peut aussi s’obtenir au moyen de toxines ou d’une modulation de la protéine SNAP-25 (synaptosomal-associated protein 25). Toutefois, pour que ces peptides neurotransmetteurs agissent efficacement, ils doivent atteindre la JNM située dans le derme et pour ce faire, les conditions suivantes doivent être réunies:

  • Ils doivent être présents à la JNM suffisamment longtemps
  • Ils doivent être réapprovisionnés
  • Ils doivent être présents en concentration suffisante
  • Ils doivent arriver intacts à la JNM.

Or, ces conditions risquent fort peu d’être réunies car l’organisme est doté d’un mécanisme d’autodéfense naturel qui élimine les protéines.

Depuis quelques années, de nombreux fabricants de cosmétiques reformulent leur message pour faire la promotion de ce que leurs produits ne contiennent pas.

Par exemple, plusieurs marques ont commencé à fabriquer et à étiqueter des produits « sans parabènes », y compris des lotions, des rouges à lèvres, des shampooings, des exfoliants, etc. Les parabènes sont les agents de conservation les plus souvent utilisés dans les produits dermatologiques. On parle de xénœstrogènes, qui imitent les œstrogènes. Les parabènes ont depuis été remplacés par le KathonMD CG, qui est un puissant sensibilisant et une cause de dermatite de contact allergique; son profil d’innocuité est pire que celui des parabènes. Ironiquement, rien ne prouve que les parabènes causent des problèmes et leur profil d’innocuité est meilleur que celui de KathonMD CG.

« Sans gluten » est une autre mention souvent utilisée, surtout dans les rouges à lèvres. Or, les rouges à lèvres n’en ont jamais contenu. Donc, la campagne de publicité des rouges à lèvres sans gluten repose sur une affirmation loufoque. Le gluten est présent entre autres dans les protéines de blé hydrolysé, l’avoine colloïdale, le bêta-glucane, l’amidon et le germe de blé. Il y a des cas où ces substances peuvent être ajoutées à des hydratants ou à des nettoyants pour la peau comme ingrédients de spécialité.

Quant aux produits « non testés chez les animaux », ils sont réputés n’avoir causé aucun préjudice ou décès chez des animaux de laboratoire. Mais bon nombre des matières premières qui entrent dans la préparation de ces produits sont testées sur des animaux à des fins d’innocuité. Bien que le produit final n’ait pas été testé sur des animaux, il y a de fortes chances que les matières premières l’aient été. Ce qui rend l’affirmation fausse.

Les produits dermatologiques végétaliens éliminent l’utilisation d’ingrédients de source animale. Il n’y a aucun avantage fonctionnel à ces préparations à base de produits végétaliens; ils représentent simplement une avenue différente.

Le terme « naturel » n’a aucun sens au regard de la réglementation appliquée aux cosmétiques selon la Food and Drug Administration (FDA), mais le United States Department of Agriculture (USDA) règlemente l’utilisation du terme « biologique ». Les produits « bio » sont réputés sans produits synthétiques. Pour être acceptés par le National Organic Program (NOP) et porter le sceau de l’USDA, ces produits doivent être biologiques à 95 %.

Les faux cils et extensions de cils gagnent en popularité. Ils sont offerts en diverses formes, tailles et couleurs, et peuvent être faits de cheveux humains, de poils de vison ou synthétiques. Ces cils sont fixés à une bande élastique au moyen d’une colle à base de méthacrylate, qui est un puissant allergène susceptible de causer une dermatite de contact allergique aux paupières. Le retrait des cils devrait toujours être effectué du centre vers l’extérieur sinon les cils naturels seront endommagés pendant le retrait. Des extensions de cils sont également proposées; ces cils sont ajoutés un à un aux cils naturels.

L’utilisation de faux cils et d’extensions de cils peut causer différents problèmes, notamment:

  • Dermatite de contact causée par la colle
  • Endommagement des cils naturels (brisés ou arrachés accidentellement)
  • Problèmes associés à la colle:
    • Paupières collées
    • Présence de colle dans l’œil
    • Fixation incorrecte des cils.

Il est important de rappeler aux patientes de ne pas dormir avec leurs faux cils puisque cela peut endommager les cils naturels.

Messages clés

  • L’eau micellaire est une solution nettoyante diluée appropriée pour enlever les produits de beauté et nettoyer le visage chez les patients qui ont une peau sensible.
  • Les hydratants peptidiques pénètrent difficilement dans la peau et on peut mettre en doute la documentation sur leur durée d’action.
  • Les allégations concernant les produits « sans x » se répandent sur le marché, mais ces prétendus attributs seraient peu utiles au plan clinique.
  • Les faux cils et les extensions de cils peuvent causer la dermatite de contact allergique en raison des adhésifs et ils peuvent endommager les cils naturels.


RÉFÉRENCES

Intérêts concurrents: La présentatrice ne déclare aucun intérêt concurrent en lien avec le contenu de cette présentation.

Rédigé par: Debbie Anderson, PhD

Révisé par: Victor Desmond Mandell, MD


SOMMAIRE

Acné

Acné : Quoi de neuf?

Hillary E. Baldwin, MD, FAAD

Dermatite atopique

Le point sur le traitement topique de la dermatite atopique

Amy S. Paller, MD, FAAD

Dermatite atopique

Dermatite atopique: Nouveaux développements

Lawrence F. Eichenfield, MD, FAAD

Dermocosmétologie

Cosméceutiques: Naturellement absurdes

Zoe Diana Draelos, MD, FAAD

Dermocosmétologie

Sujets de l’heure en dermatologie cosmétique

Anthony V. Benedetto, DO, FAAD

Tumeurs cutanées, Mélanome

2018 – Tumeurs cutanées chez les enfants

Jane M. Grant-Kels, MD, FAAD

Tumeurs cutanées, Mélanome

Le point sur le mélanome – 2018

Allan C. Halpern, MD, FAAD

Tumeurs cutanées, Mélanome

Stratégies actuelles de prise en charge du mélanome

Daniel Ethan Zelac, MD, FAAD

Alopécie

Alopécies de tout poil: Quoi de neuf?

Wilma Fowler Bergfeld, MD, FAAD

Maladies infectieuses

Le VIH en 2018

Kieron S. Leslie, MD, MBBS, MRCP, DTM&H

Maladies infectieuses

Le point sur la syphilis

Theodore Rosen, MD, FAAD

Patients pédiatriques

Comment choisir un agent antipsoriasique systémique?

Amy S. Paller, MD, FAAD